Retour en terre hippie

Chers familles et amis,

      Me voilà donc à Santa Cruz depuis... trois semaines je crois? Le temps passe vite et à chaque fois que j'y pense, j'ai des bouffées de panique rapport à ce mémoire. Ça ne m'empêche quand même pas de procrastiner chaque jour un peu plus...


     Euh, si je reprends tout ça chronologiquement, pour ceux d'entre vous à qui je n'ai pas encore parlé, mon vol s'est bien passé. Enfin, "bien passé" : on ne s'est ni écrasés, ni perdus dans l'éther mais passer onze heures sans la distraction de la vue du hublot, coincée au milieu d'un groupe d'ingénieurs polonais bourrés à la vodka cerise, c'était quand même un peu long. J'ai eu un petit peu peur quand je suis arrivée au "borders and customs" parce que je suis tombée sur un agent beaucoup plus inquisiteur que lors de ma première visite. Il m'a posé plein de questions sur ce que j'allais faire pendant mon voyage, d'où venait mon argent etc... Astrid et Lee, votre lonely planet m'a servi d'alibi! Finalement, il m'a laissée passer après avoir pris mes empreintes et ma photo et j'ai pu retrouver Warren qui m'attendait dans le hall. Il avait mis une chemise et il m'avait préparé un sandwich à l'avocat et à la tomate. C'était bien.

      Warren - et moi maintenant! - vit dans un appartement sur Broadway - donc j'habite à Broadway... On le partage avec Felicity qui doit avoir mon âge et travaille chez Google à Mountain View. Tous les jours, elle prend le fameux bus Google que des manifestants ont bloqué récemment pour protester contre la gentrification de San Francisco et sa baie. Le fait est que les loyers sont ahurissants ici, à Santa Cruz comme à San Francisco. Je pense que Warren aurait pu trouver un appartement un peu moins joli pour moins cher mais il a pris le premier endroit correct où on lui a dit oui. Et puis, il a beau râler contre le loyer, il a aussi ses "standards"... Santa Cruz est vraiment très chère. C'est un peu la ville balnéaire à la mode, jeune et hip grâce à l'université où veulent vivre tous les cadres de Google, Apple et cie. Mais du coup, grâce aux standards de Warren, l'appartement est vraiment chouette. On est à 1,5km de l'océan. Il y a des magasins bio à distance marchable. Pas mal d'églises latinos alentours aussi. Tout ce dont on peut avoir besoin!


      Quelques jours après mon arrivée, je suis montée voir le campus. Franchement, l'université américaine a l'air d'être une expérience tellement géniale que ça me rend surtout amère quand je compare à la mienne. Du coup, les quelques fois où je suis allée à la fac ici, au lieu de travailler j'ai passé mon temps à ruminer sur mes erreurs de parcours et à chercher furieusement quoi faire l'année prochaine pour ne pas les répéter. Pas très efficace, question mémoire.

       L'University of California, Santa Cruz ou UCSC est un des dix ou onze campus de l'université publique de l'Etat de Californie. Comme je l'avais déjà décrit avant, le campus est éparpillé dans une forêt de redwoods sur les collines qui surplombent la ville. C'est très beau. En plus de ça, l'université à la réputation d'être extrêmement alternative et libérale. J'avais l'intention de suivre quelques cours et je suis allée au premier mais même si ça avait l'air super intéressant, c'était des choses que j'avais plus ou moins déjà faites. J'ai du mal à me repérer dans le niveau des cours ici. Ce qui m'étonne le plus, comparé à mes cours en France, c'est la motivation des étudiants. Les gens participent énormément, tout le monde a des questions, tout le monde veut trouver les livres et faire les lectures... Mais même si UCSC est moins chère que les universités privées, chaque année coûte au moins 15000$ et j'imagine que du coup, il y a très peu de chance que quelqu'un soit là par hasard et à moitié motivé. La bibliothèque est assez géniale. Il y a tellement de ressources que je ne sais pas par où commencer. J'ai de la chance qu'il y ait un département de Relations Internationales parce que ce n'est pas le cas partout. 

    Au mariage de Margi et Autumn, j'en ai parlé avec pas mal de personnes et tout le monde, sans exception, m'a affirmé que leurs années à l'université étaient les meilleures années de leur vie. Franchement, est-ce que vous avez déjà entendu un seul étudiant français dire ça?? Je trouve que l'ambiance qui règne sur le campus est vraiment rassurante et encourageante, faute de meilleurs adjectifs. Tout le monde se balade habillé n'importe comment (en pyjama, en jogging...), ça crée une atmosphère vraiment décontractée et bienveillante je trouve. Ça reflète bien la disposition des gens qui sont très abordables. La vie culturelle et associative est juste incroyable. On peut tout faire. Ça pousse vraiment à être créatif. Bref, voilà, ça me rend juste amère quand j'y passe trop de temps.

      Voilà un super documentaire sur UCB, l'université de Californie à Berkeley, qui passe peut-être encore à l'Utopia. Il dure quatre heures mais c'est quand même trop bien. Il n'est encore disponible nulle part en téléchargement (j'ai bien cherché).




    En fait, l'université reflète bien l'état d'esprit qui règne ici. Tout le monde est resté un peu hippy. Le lonely planet dit que c'est toujours cool d'être un hippy ou un stoner ici à Santa Cruz. Ou encore mieux : les deux à la fois. Même si, quand on gratte un peu, on trouve un millionnaire de la silicon valley qui se cache sous le t-shirt tye&dye. C'est assez marrant comme ambiance, ça encourage plutôt les bons côtés de ma personnalité mais parfois j'ai l'impression d'être un peu spectatrice quand les gens commencent à partir dans des délires new-age. Je dois déjà être un peu trop cynique. Pourtant ces dernières semaines on m'a dit des choses comme "Tu as une énergie tellement géniale!" ou "J'adore l'énergie que tu dégages!". Sic, bien sûr. 

     A une fête la semaine d'avant, j'ai rencontré deux bonhommes dont j'ai cru qu'ils se fichaient de moi quand ils m'ont dit qu'ils étaient frères. J'était sceptique parce que l'un avait l'air d'avoir trente ans et l'autre quatre-vingt. Mais en fait, c'est juste que leur père était le gourou d'une secte hippie basée à San Francisco et qu'il a fait des enfants à toutes les femmes de la communauté. Ils pensent avoir une soixantaine de frères et soeurs, ils sont 10 ou 15 à bien se connaître. Après tout, leur père était le messager galactique hein. Ils étaient vraiment cool en tout cas. Voir le site web du Galactic Messenger.

     Mais je pense que si je passe suffisamment de temps ici, il y a de grandes chances que moi aussi je commence à percevoir et apprécier l'énergie positive des gens, que je trouve un truc quelconque à retirer de mon alimentation (la viande, le gluten ou le soja...). Il faudrait me mettre au yoga aussi, arrêter de boire pour commencer à fumer de la beuh biologique locale dans les petites pipes en verres comme tout le monde, où mieux encore dans un "vaporisateur" (c'est meilleur pour les poumons). Après tout, en juste trois semaines, j'ai commencé à faire mon footing sur la plage, à manger du kale, et du tempeh (non mais franchement, il y a teeellement plus de protéines que dans le tofu, si si si). La semaine dernière, le journal local faisait sa couverture sur l'orthorexie hahaha. 

      Au petit supermarché bio où on fait nos courses, "Staff of life", les magazines exposés autour des caisses me font trop rire. Ce sont des choses comme High Times, le magazine de la ganja et de la pop culture Voir les couvertures de High Times!!. Il y a aussi Paleo, le magazine pour les adeptes du mode de vie primitif moderne comme Gwyneth Paltrow. Gwyneth Paltrow a dit qu'elle mourrait plutôt que de donner une soupe instantanée à ses enfants. Les paleo excluent presque totalement les sucres de leur régime alimentaire, et savent que les germes sont les meilleurs amis de leurs enfants. Par ailleurs, Gwyneth Paltrow ne divorce pas mais procède à un "découplage conscient" (conscious uncoupling) de son mari. Je l'ai lu dans Paléo magazine.

      En plus des hippies et des gens sains, il y a beaucoup de sdf et de vagabonds à Santa Cruz. La légende urbaine dit que les homeless représentent 10% de la population de Santa Cruz, mais Warren dit avoir des chiffres fiables d'une amie à lui travailleuse sociale qui dit que sur le county il y a environ 3500 personnes qui vivent dehors en moyenne sur l'année. Je crois que Santa Cruz a 60000 habitants, et le county c'est juste les petites villes autours. Bref, c'est assez considérable. Il y a beaucoup de fous, comme à San Francisco. Il y a ce bonhomme qui ne porte qu'une couverture sur lui comme vêtements. Ça me laisse vraiment perplexe qu'une telle situation perdure ici. D'après un ami de Warren, s'il y a autant de homeless autour de la baie de San Francisco et à Santa Cruz, c'est d'une part à cause du libéralisme politique qui fait qu'ils ne sont pas chassés par les autorités comme ils le sont ailleurs sur la côte est ou dans le sud de la Californie, mais c'est aussi justement parce que la région est si riche. L'ami de Warren, qui a lui même expérimenté la vie de vagabond (un peu comme dans Into the Wild) dit que c'est relativement facile de vivre de ce que jettent les gens dans la Silicon Valley. D'après lui, plus facile même que pour les gens qui ont de petits salaires.

      Au lieu de travailler mon mémoire (je confesse et donc j'expie mes fautes non?), j'ai récemment lu le huitième tome des "Chroniques de San Francisco" : "Mary-Ann in autumn". Evidemment, le personnage de Mary-Ann est toujours aussi détestable mais le livre décrit assez bien la situation des clochards à San Francisco à travers le personnage de Leia, une femme sdf qui meurt au début du livre et dont la vie finit par obséder la fille de Mary-Ann. Je trouve ça assez intéressant et révélateur qu'Armistead Maupin (l'auteur des chroniques) ait fini par intégrer les homeless à ses histoires. Quand on sait que les personnages des chroniques sont surtout prétextes à parler de San Francisco elle-même, le fait que Maupin choisisse d'en faire le coeur de l'intrigue dans montre à quel point la population sdf est devenue une part de l'identité de la ville. Il y a une excellente petite série de HBO qui parle bien de San Francisco : "Looking". Un peu comme dans les chroniques, on suit un personnage qui vient d'ailleurs et qui arrive à San Francisco (comme tout le monde dans cette ville d'ailleurs). C'est simple, sans prétention, il n'y a que huit épisodes de trente minutes par saison, mais comme tout ce que produit HBO c'est bien écrit et puis ça rend toute l'ambiance de la ville. Franchement, si j'écrivais mon mémoire sur les productions de HBO, j'y passerais tout mon temps sans renâcler. Encore une preuve que j'ai probablement raté toute mon orientation.




     Voilà pour les aspects plus ou moins pittoresques de la vie locale. Je crois que la semaine prochaine, on va célébrer "Earth Day". Vous ne connaissez pas le Jour de la Terre? C'est un peu la fête nationale ici à Santa Cruz. Je pense que j'aurai plein de trucs à raconter avec ça! 

      Sinon, j'ai mangé quelques trucs qui valaient le coup, que je voulais vraiment essayer parce que c'est si américain. On a fait des nachos avec des copains de Warren, j'ai mangé du poulet frit comme au Kentucky chez Betty. 




On est partis camper au nord de la Californie et on a fait des s'mores sur notre feu de camp. Je raconterai le camping une autre fois, une fois que j'aurais rangé les photos. Ce sont des marshmallows grillés sur un morceau de chocolat entre deux biscuits. C'est sucré quoi.


     Dimanche, on est allés à une dégustation de vin avec Margi et Autumn. C'était gratuit et c'était trop bon! Ils avaient le meilleur pain que j'ai mangé ici pour l'instant (je désespère un peu de trouver du bon pain), et un saucisson au vin à se damner. Le vin aussi était bon. De toute évidence, j'étais la personne la plus ignorante en vin à cette dégustation mais c'était relax et pas du tout intimidant. En plus, Autumn qui a travaillé dans les vignobles de la vallée de Sonoma avait plein de choses intéressantes à dire sur le vin. Quelqu'un s'est ramené avec un cochon domestique. Le soir, on a fait des pizzas avec les amis italiens de Margi.

    C'est à peu près tout. Là, je raconte un peu n'importe quoi et ce qui me passe par la tête mais la prochaine fois je tenterai de raconter notre périple dans les parcs de redwoods du nord et le mariage de Margi et Autumn, aka le mariage le plus cool du monde. Dès que j'aurai quelques photos. En fait, je pense qu'après ça, je n'aurai plus grand chose à dire parce qu'il faudrait que je me mettre sérieusement à mon mémoire. Warren ne va rien faire d'autre que travailler pendant les deux prochains mois donc je pense qu'il n'y aura pas d'autres petits voyages. Il passe déjà environ 12h par jour devant son ordinateur à bosser, même le dimanche. Il me donne des complexes. 

A bientôt!





Commentaires

  1. Lucie, continues à écrire ces articles !!
    Je viens de faire une énorme pause sur mon mémoire. Énorme parce que j'ai lu ton article, que tu m'as permis de m'évader et que maintenant je n'ai qu'une envie c'est de surfer sur le net et chercher des idées pour un trip, quelque soit l'endroit (bon ok, au Canada pour commencer ;) ).
    Profites à fond, vraiment! Mémoire, master, orientation... Toutes les décisions viendront à temps ne t'en fais pas :)
    Tu es une personne sensée de toute façon, tu feras ce qu'il faut... Et tu deviens tellement riche de toutes ces expériences! Je t'envie !

    Bisous ! A très bientôt ! Hâte de lire la suite !
    Pauline from Toulouse !!

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